A u sentier d’interprétation Agassiz de Conservation de la nature Canada (CNC), dans le sud-est du Manitoba, le cycle des saisons s’accompagne de variations de la trame sonore.
Au printemps, vous entendrez peut-être des gélinottes huppées voler dans la forêt ou des mésanges chanter joyeusement autour de vous alors que les anémones pulsatilles percent le sol pour apparaître dans l’herbe aplatie et séchée.
Le temps plus chaud s’accompagnera du chant familier et du plumage coloré des sturnelles de l’Ouest, des chardonnerets jaunes et des jaseurs d’Amérique.
Au milieu des quenouilles et des barbons de Gérard, des graminées hauts de 2 mètres, vous aurez peut-être de la difficulté à croire que vous vous trouvez dans l’un des écosystèmes les plus rares de l’Amérique du Nord.
« Aujourd’hui, 0,5 % des prairies à herbes hautes subsistent, dit Tim Teetaert, coordonnateur d’aire naturelle de CNC au Manitoba. Il s’agit également de l’une des prairies les plus diversifiées sur le plan biologique dans le monde. Le sentier d’interprétation Agassiz traverse une zone de rencontre de diverses communautés végétales de l’aire naturelle des prairies à herbes hautes. Le long du sentier, les changements du taux d’humidité et de luminosité vous amèneront à traverser plusieurs de ces communautés. »

En automne, la plupart des oiseaux des prairies se regroupent afin de se préparer à migrer vers le sud. En hiver, vous pourrez entendre le pépiement des oiseaux, comme les mésanges et les geais bleus, qui demeurent à cet endroit toute l’année.
Dans les zones plus sèches de la propriété se trouvent des prairies ouvertes et des hautes terres forestières, ainsi que des savanes de chênes. Plusieurs espèces d’oiseaux y sillonnent le ciel, y compris le tyran huppé, l’oriole de Baltimore et des douzaines d’espèces de parulines, d’oiseaux de proie, de chouettes et de pics
« Dans les prairies de carex et leurs environs se trouvent de nombreux insectes, rongeurs et oiseaux, y compris des troglodytes à bec court, des barges marbrées et des grues du Canada, explique M. Teetaert. Vous pourriez aussi entendre des râles jaunes, dont le chant évoque le bruit de deux petits galets qui s’entrechoquent. »
Ces milieux fournissent des liens de grande valeur avec les communautés des prairies environnantes. Elles procurent également des abris, de la nourriture et de l’eau pour de nombreuses espèces des prairies.
Les zones humides de la propriété font partie intégrante du paysage et aident à maintenir la santé de l’écosystème. « Ces milieux humides attirent un ensemble d’espèces qui se distinguent de celles qui sont caractéristiques des prairies, mentionne M. Teetaert. Des grenouilles, des serpents, des libellules, des caloptéryx et des espèces d’oiseaux, dont le carouge à épaulettes et diverses espèces de sauvagines habitent ici. »
Cette aire abrite également l’une des fleurs les plus menacées du Canada : la platanthère blanchâtre de l’Ouest.
« Il y a quelques années, à la fin d’un printemps extrêmement pluvieux, au début d’un été précoce, j’ai découvert un site le long du sentier où des platanthères blanchâtres de l’Ouest étaient sous au moins un pied d’eau. C’était si génial et étrange à la fois. Environ 50 % de la population mondiale de cette fleur se trouve dans l’aire naturelle des prairies à herbes hautes. »
Le rôle que joue M. Teetaert auprès de CNC lui permet d’apprécier encore plus les diverses espèces dont recèlent cette région tout au long de l’année.
« La nature est diversifiée et s’autorégule. Elle atteint un certain équilibre et une certaine harmonie naturellement. La biodiversité est souhaitable en soi, car la vie est enrichie par l’existence de nombreuses espèces distinctes. Travailler pour un organisme comme CNC me permet de jouer un rôle d’intendance. Je peux utiliser les meilleures données scientifiques disponibles afin de laisser derrière moi, je l’espère, un monde meilleur pour les générations futures. »
Tout au long de l’année, les visiteurs qui se rendent dans cette région peuvent profiter d’une démonstration inoubliable de la résilience d’un écosystème rare des prairies grouillant de vie.
Une espèce parmi les plus rares au pays
La discrète platanthère blanchâtre de l’Ouest, une espèce d’orchidée en voie de disparition, pousse dans l’un des écosystèmes les plus rares de l’Amérique du Nord, soit la prairie à herbes hautes.
Cette orchidée peut mesurer jusqu’à 88 cm de hauteur et compter de 4 à 30 fleurs blanc crème. Ces fleurs sont dotées d’un pétale inférieur découpé en 3 segments, dont chacun forme une frange.
On trouve la platanthère blanchâtre de l’Ouest dans le sud-est du Manitoba ainsi que dans sept États du Midwest américain. Au Manitoba, elle pousse dans les prés et les prairies humides dont le sol est riche en calcium ou alcalin. On la trouve le plus souvent dans des zones intactes, mais on peut également l’observer dans des fossés le long des routes. Environ 50 % de la population connue de cette plante pousse sur une surface de 48 kilomètres carrés à l’ouest de Vita, au Manitoba.

Photos : CNC